L’Université de Makerere accueille les 23 et 24 octobre 2024, la septième édition de la Conférence géopolitique de Kampala. Cet événement majeur devenu au fil des ans, un rendez-vous incontournable pour les experts en droit international et les acteurs de la justice transitionnelle en Afrique, réunit cette année des spécialistes de premier plan autour de la thématique des crimes de guerre et des violences basées sur le genre.
Dès la séance d’ouverture, le ton est donné avec un panel d’experts qui aborde frontalement la question des “Interactions entre les crimes de guerre, les violences basées sur le genre et la justice”, une problématique particulièrement alarmante dans une région qui porte encore les cicatrices de nombreux conflits.
Une réalité alarmante au cœur des débats
Le Dr Guillemine Taupiac Nouvel, dont l’intervention a marqué les esprits dès l’ouverture de la conférence, a mis en lumière un constat glaçant : la persistante “invisibilisation” des violences sexuelles et basées sur le genre dans les conflits armés, un phénomène d’autant plus préoccupant qu’il semble normalisé à l’échelle mondiale.
Les chiffres présentés par Scott Bartell donnent la mesure de l’ampleur du phénomène : plus de 2 millions de victimes recensées en Afrique de l’Est et de l’Ouest. Plus alarmant encore, la proportion de victimes civiles atteint désormais 85% de pertes, dont un tiers d’enfants, une statistique qui, selon ses mots, “constitue une tache indélébile pour l’humanité”.
Des approches novatrices pour une justice effective
Sarah Kihika Kasande, une autre intervenante a souligné l’importance cruciale d’une approche holistique, combinant un cadre juridique robuste et un soutien psychosocial aux victimes. Une dimension particulièrement troublante a été mise en évidence lors de son intervention : l’utilisation systématique des violences sexuelles comme arme de guerre, visant à “anéantir des sociétés entières”.
Le Dr Irene Winnie Anying a, quant à elle, proposé une approche novatrice, préconisant la conjugaison des systèmes juridiques traditionnels et formels pour une justice plus efficace, et culturellement adaptée. Cette proposition fait écho aux réalités du terrain exposées par Stephen Ojara Okello, qui a notamment souligné les tensions croissantes dans les communautés du Nord de l’Ouganda, accueillant des réfugiés.
Des solutions concrètes en marche
Le Fonds au profit des victimes de la CPI, acteur majeur dans la région, travaille déjà avec plus de 30 organisations locales, déployant un large éventail d’interventions allant des compensations financières au soutien psychosocial, en passant par des programmes de réhabilitation communautaire.
Cette septième édition de la Conférence géopolitique de Kampala s’annonce comme un moment charnière dans la réflexion sur les réponses à apporter aux crimes de guerre et aux violences basées sur le genre. Les discussions qui se poursuivront jusqu’au 24 octobre promettent d’apporter des éclairages nouveaux sur ces problématiques complexes, tout en renforçant la coopération régionale et internationale dans la lutte contre l’impunité.
Alors que la conférence se poursuit, l’accent est mis sur la responsabilité première des États dans la lutte contre ces crimes, tout en soulignant l’importance d’une approche coordonnée, associant justice internationale et solutions locales. Un défi immense, mais que la diversité et l’expertise des intervenants présents à Makerere permettent d’aborder avec un optimisme mesuré.
Claudine N. I.