À Goma, on aura tout vu avant de mourir. Depuis la venue de l’état de siège qui implique l’avènement des autorités militaires et policières dans l’administration, la capitale provinciale du Nord-Kivu vit au rythme de “Chacun pour soit, Dieu pour tous” : les uns plaident pour les procédures judiciaires, les autres jugent sans aucune forme de procès.
Ici, les autorités à différents niveaux pensent donner le meilleur d’elles-mêmes et s’investir dans leurs actions pour tenter de rassurer. De l’autre côté, la population qui subit les atrocités de tout genre : cambriolages, tueries, crépitements des balles et tracasseries est convaincue que leurs dirigeants ne sont pas tellement investis pour inverser la tendance.
Parmi les actions des autorités de l’état de siège, les motos ne circulent plus depuis après 18 heures. Cette décision est devenue un mode de vie et les autorités semblent être décidées à priver éternellement la ville de Goma de ce moyen de transport, important pendant les heures tardives. L’enregistrement des véhicules en vitres teintées couronné par un déboursement de 20 dollars américains, pour une population bien asphyxiée par l’occupation des combattants du Mouvement du 23 mars (M23).
Après échec inavoué de ces deux mesures, dans la foulée, survient l’opération “Safisha muji wa Goma”. Dans ce scenario, l’autorité urbaine utilise son énergie dans une présentation sans fin de “présumés” criminels et assassins de X ou Y, tentant de prouver qu’un travail est en train d’être fait. Visiblement, oui mais au fond, des interrogations persistent autour du sort de ces personnes arrêtées dont des procès publics sont constamment demandés par la population, qui doute encore de cette affaire.
Malgré ces tentatives inespérées et ces spectacles, la population joue sa partition. Elle qui subit des exactions des bandits armés qui commettent l’insupportable et qui rendent la ville invivable, sait vraiment faire sa part mais malheureusement, son intervention finit par des morts d’hommes.
Les procédures judiciaires sont jugées longues et génantes pour des habitants, qui veulent voir la ville retrouver sa quiétude. De ce fait, ils se livrent à des justices populaires. Pas plus tard que la soirée du samedi 19 octobre, la population a condamné à mort et sans aucun jugement préalable, trois individus accusés d’avoir cambriolé un shop vers l’entrée trois lampes : trois personnes ont été brulées vives avec leur moto, expression de la colère.
Durant les semaines précédentes, la population s’était encore rendue justice, en faisant subir le même sort à d’autres présumés criminels vers Afia Bora. Cette réaction est cependant normale pour une population fatiguée de compassion, vu qu’elle encaisse des cambriolages, des crépitements des balles, des tracasseries et se sentent à la merci des criminels, qui sèment terreur et désolation à leur guise.
Les autorités ne cessent cependant d’inviter la population à se défaire de cette justice, pour leur permettre de mener des enquêtes pour barrer la route à d’autres bandes. Malheureusement, cet appel va nulle part : si la population tombe sur de présumés criminels, les agents de l’ordre ne viendront qu’éteindre le feu sur des corps calcinés.
Durant ces moments critiques où la ville de Goma saigne à chaque instant et vu le contour avec des rebelles du M23, soutenus par le Rwanda qui exacerbent la situation, une franche collaboration et surtout, la confiance sont demises pour sortir Goma du gouffre actuel qui défie la résilience, connue comme image, la marque principale de la capitale provinciale du Nord-Kivu.
Guerschom Mohammed Vicci