Lors d’une conférence-débat animée ce vendredi 27 juin dans la ville de Goma au Nord-Kivu, la coalition AFC-M23 a finalement présenté les causes profondes du conflit dans l’Est de la République démocratique du Congo.
Derrière, la rébellion attribue les différentes crises sécuritaires que connait la région, à l’échec des accords de paix souvent signés entre le Gouvernement congolais et les mouvements rebelles, qui ont vu le jour pour une lutte que Bertrand Bisimwa a qualifiée « d’existentielle ».
Pourtant, Kinshasa est de nouveau en passe de signer un nouvel accord avec Kigali à Washington aux Etats-Unis, visant une résolution pacifique à la sempiternelle guerre, qui décime de vies et freine le dévéloppement de la région.
Le M23-AFC dénonce le non respect des accords de paix, bien qu’ils contiennent des réponses aux nombreux problèmes posés.
L’accord de paix de Sun city, noeud du problème
Le tout premier est celui de Sun city en 2003. Signé sous l’égide de l’Union africaine (UA), des Etats-Unis, de l’Union européenne (UE) et de l’Afrique du Sud, il devrait mettre fin notamment à la deuxième guerre du Congo, en s’attaquant à l’exclusion politique, l’insécurité communautaire et la réforme des institutions de la République.
La mise en place de la « fameuse » Commission vérité-réconciliation qui devrait faire la lumière sur tous les crimes passés, restaurer la confiance entre les communautés et jeter les bases d’une paix durable est restée lettre morte face à une volonté politique en berne.
Bien que prometteuses, les résolutions inscrites dans cet accord de paix n’ont jamais trouvé gain de cause, plongeant le pays dans de nouvelles guerres. Le partage du pouvoir a totalement ignoré toutes les réformes décidées.

« La non application des réformes a semé le grain des rébellions futures », a expliqué Bertrand Bisimwa, coordonnateur politique adjoint chargé des questions politiques, administratives, diplomatiques et juridiques de l’AFC-M23 lors de la conférence-débat.
Parmi ces rébellions, le Congrès national pour la défense du peuple (CNDP) dont les pourparlers avec Kinshasa, conduiront à l’accord du 23 mars 2009.
Un autre accord, c’est le « Gentleman agreement« . Au travers celui-ci, la neutralisation de groupes armés passait par le processus de mixage. Les choix opérés lors de ces opérations de mixage, ont occasionné de nouvelles fustrations.
La conférence sur la paix, la sécurité, le dévéloppement dans les provinces du Nord et Sud-Kivu, et les actes d’engagements de Goma de 2008 sont également restés coincés dans les tiroirs, alors qu’ils contenaient des résolutions nécessaires pour stopper la spirale de violences.
Dans les actes de Goma se trouvaient notamment le désarmement, la démobilisation, la réintégration, des programmes de stabilisation et de reconstruction, et le retour des réfugiés.
La réconciliation n’étant pas venue de l’accord du 23 mars, un nouveau groupe armé a vu le jour. Signé avec le CNDP, cet accord préconisait l’intégration des rebelles au sein des FARDC, la neutralisation de groupes armés, un plan de pacification et de renforcement de différentes communautés, le retour des réfugiés et la transformation du CNDP en parti politique.
Bertrand Bisimwa a indiqué que les exactions commises et le manque du sérieux dans le mise en oeuvre des résolutions ont ravivé la méfiance et renforcé la détermination des communautés qui se sentaient marginalisées, à se défendre dont l’avènement du Mouvement du 23 mars (M23).

Les déclarations de Nairobi du 13 décembre 2013. Facilité par la SADC, le Kenya, l’Ouganda, l’UA, les Nations Unies, les USA, l’UE, cet accord exigeait au M23 à mettre fin à sa rébellion, et lui reconnaissait le droit de se transformer à une organisation du droit commun.
Dans ce sens, le M23 avait alors signé un acte de cessation de rébellion et par ricochet, à déposer les armes. La responsabilité de Kinshasa se situait alors dans l’application de l’accord du 23 mars 2009.
Tous ces accords signés entre le Gouvernement congolais et les différents mouvements rebelles n’ont jamais connu des succès, en raison du manque d’engagements dans la mise en oeuvre des résolutions se trouvant dans ces documents, censés mener à la paix.
Le nouvel accord de paix de Washington qui sera signé ce vendredi entre la République démocratique du Congo et le Rwanda, risque de faire face aux mêmes défis, si aucune mesure contraignante n’accompagne sa mise en oeuvre par les parties concernées. L’avenir de la paix et de la stabilité de la région en dépendent.
Guerschom Mohammed Vicci