Dans un briefing mercredi 15 mai devant la presse à Goma, les ministres de la communication et des médias, Patrick Muyaya, des droits humains, Fabrice Puela et celui des affaires sociales et humanitaires, Modeste Mutinga aux côtés du gouverneur militaire intérimaire du Nord-Kivu, le Général-major Peter Chirimwami sont revenus sur les bombardements ayant ciblé les camps de déplacés de Mugunga et du Lac vert, le 03 mai dernier et d’autres sujets d’actualité.
Ces bombardements dont l’origine a été localisée dans les hauteurs de Karuba autour de la cite stratégique de Sake en territoire de Masisi, ont causé la mort de trente-cinq personnes dont vingt-deux enfants, y compris des nourissons. Le ministre des droits humains a qualifié l’intention des terroristes du M23, soutenus par le Rwanda de « délibérée ». Pour Fabrice Puela, l’armée rwandaise a « délibéremment » ciblé ces camps, sachant qu’il ne s’y trouvait aucun camp militaire.
Six corps ont été difficiles à reconstituer, en raison des dégâts causés par la bombe. « 22 sont des enfants, certains sont des nourissons et représentaient l’avenir de leurs familles, ils étaient le produit des rêves de leurs parents », déplore Patrick Muyaya, qui narre également des parents qui ont laissé des orphelins. « Parmi ceux qui sont morts, des femmes, des parents qui laissent des orphelins, qui laissent des familles avec un avenir compromis », en affichant complètement la volonté que cette situation s’arrête.
Goma respire encore
Malgré ce contexte, la ville de Goma respire encore. Pour le ministre de la communication et des médias, il y a plus de manipulations que des faits sur le terrain. « Il y a plus un sentiment d’insécurité que l’insécurité elle-même », alimentée par une certaine manipulation orchestrée par des personnes malintentionnées, avec l’intention de semer la terreur.
Le Gouverneur militaire intérimaire, le Général-major Peter Chirimwami reconnait qu’il y a eu des incidents notamment durant le début du mois d’avril, qui ont poussé à la prise des mesures. Au début de l’année par exemple illustre l’autorité provinciale, avec une criminalité urbaine placée entre 18 et 20 heures, ce qui a conduit à l’interdiction de la circulation des motos après 18 heures.
Derrière cette criminalité, « on a trouvé qu’il y avait environ 500 motards qui venaient du Rwanda et là, ils travaillaient jusqu’à 22 heures et commettaient des crimes avant de rentrer chez eux ». La décision d’interdiction a eu un impact positif. Néanmoins, le maire de Goma a reconnu que cette mesure n’est pas éternelle. De ce fait, « nous observons encore la courbe. Si le taux de criminalité baisse, nous allons lever la mesure », a rassuré le Commissaire supérieur principal Kapend Kamand Faustin, maire intérimaire.
Aux côtés de l’interdiction de circulation des motos, d’autres mesures ont été mises en contribution dont l’opération « Safisha muji », marquée par des bouclages ciblés, des percusitions qui ont permi de réduire sensiblement des cas de criminalité urbaine.
Goma respire encore, oui, mais la situation reste dramatique
Si la ville de Goma maintient son souffle dans un environnement pas rassurant, la situation des déplacés de guerre laisse à désirer. Modeste Mutinga, ministre des affaires sociales et humanitaires déplore la précarité dans laquelle vivent les déplacés de guerre qui selon ses dires, manquent de « tout ».
Le gouvernement lors de cette visite, a apporté plus de 4 tonnes de vivres et non vivres aux déplacés. Néanmoins, les premières préoccupations ont été prises en charge. « La situation que nous avons trouvée sur le terrain, est dramatique du point de vue humanitaire parce que ces personnes manquent de tout », se tourmente l’auteur du livre : « La République des inconscients ».
L’aide apportée reconnait le ministre des affaires sociales et humanitaires, va à l’encontre des règles humanitaires, qui exigent que l’assistance couvre une période de trois et que cela soit renouvelable. « Ce minimum ne pourra pas faire 3 mois », s’alarme Modeste Mutinga, voyant la misère des déplacés.
Mémorial du Génocost à Kibati
L’érection du mémorial du Génocide congolais pour des raisons économiques (Génocost), n’est pas un hasard. La guerre de l’Est de la République démocratique du Congo a déjà fait plus de 10 millions de morts. Le ministre des droits humains, Fabrice Puela a expliqué que devant les juridictions tant nationales qu’internationales, ce sont les preuves qui comptent.
« Quand nous disons qu’il y a plus de 10 millions de morts, ils nous demandent où sont-ils ? ». Même le Haut-commissaire des Nations-unies aux droits humains, Volker Türk lors de son passage à Kinshasa et à l’Est, a fait retentir le même son : « Vous parlez des millions des victimes mais où sont-ils ? », explique le Directeur général des Fonds national des réparations des victimes de violences sexuelles liées aux conflits et des crimes contre la paix et la sécurité de l’humanité (Fonarev), Lucien Lundula, signifiant que ce mémorial permettra désormais de localiser toutes les personnes massacrées dans la partie Est de la République démocratique du Congo.
Néanmoins, « Ce n’est pas parce qu’on a un cimetière que nous encourageons les massacres. Il faut que ça s’arrête », insiste Fabrice Puela. Le ministre des droits humains a rappelé l’urgence d’établir « la justice transitionnelle », pour réparer tous les dommages causés suite à l’incapacité de l’État de s’assumer face à la sécurité des populations civiles.
Guerschom Mohammed Vicci