Résultats provisoires des législatives provinciales : à Beni, les candidats favoris désillusionnés
Le seuil électoral rabat-joie
Le dimanche 21 janvier 2024, la nuit tombe à Beni sous une atmosphère presque festive. Les beniciens viennent d’assister à un Match splendide opposa les Lions de l’Atlas de Maroc à leur équipe nationale les Léopards du groupe F de la CAN Côte-d’Ivoire 2023. La prestation des Léopords était meilleure que les beniciens considèrent leur équipe gagnante, malgré le résultat de nul (1-1).
Mais la joie sera de courte durée. Cette même nuit de dimanche 21 à ce lundi 22 janvier, la Commission électorale nationale indépendante (CENI) procède à la publication des résultats des législatives provinciales, faisant oublier tout du match. Deux noms sortent de centaines de candidats que comptait la circonscription de Beni ville. Il s’agit de : Kule Vihumbira Cadet et Mbafumoja Elie. Ce sont les deux élus, qui vont représenter la ville de Beni au niveau provincial. Si l’un est parmi les favoris, l’autre par contre, la population peine à le reconnaître.
Comment cela est-il possible ?
Pourtant, nous avons massivement élu d’autres se demandent plusieurs électeurs. La réponse est vite donnée par les initiés. C’est l’effet miracle du « seuil électoral ».
Pour rappel, les législatives nationales publiées quelques jours avant, n’avaient pas échappé non plus au miracle du « seuil électoral ». Deux candidats étaient sortis du lot : Mwaka Arsène et Kiyaya Atshongya Elvis. Ces élus seront au niveau national. Certes, des candidats favoris, mais loin d’être à la tête des favoris.
On constate que les candidats les plus favoris et élus avec des milliers de voix, tombent. La magie du « seuil électoral » persistent et signent des experts en matière électorale.
Quid du seuil électoral ?
Plusieurs candidats favoris, c’est-à-dire très populaires dans la communauté, ont échoué à ces élections car leurs partis et regroupements politiques n’ont pas atteint le seuil électoral.
Selon Augustin Ntaitunda, expert en matière électorale au sein l’ONG Américain freedom house, les partis et regroupements politiques devraient au départ, instruire leurs candidats afin que ces derniers se confrontent à ce jeu électoral.
« Plusieurs candidats devaient être populaire dans leur circonscription, mais quand on prend par exemple la province du Nord-Kivu, vous trouvez un parti qui n’est populaire que dans un territoire ; alors, lorsqu’on totalise les voix de tous les partis pour calculer le seuil, puisque c’est une condition pour l’éligibilité, on ne se retrouve nulle part puisque le parti n’a pas obtenu plusieurs voix. Pour l’élection des députés nationaux, un seuil de 1 % du nombre total des suffrages exprimés, est déterminé au niveau national. En clair, pour bénéficier de l’attribution des sièges, il faudra atteindre ou dépasser ce seuil. Pour comprendre le seuil de représentativité de 1 %, il faut considérer ces partis qui sont appelés à recueillir au moins 1 % de suffrage au niveau national, pour être autorisés à siéger », précise-t-il.
Les voix obtenues par un parti politique sur toute l’étendue nationale ou provinciale, c’est ce qui donne un siège a priori. Puis les voix obtenues par le candidat dans sa circonscription.
Des leçons à tirer
L’abaissement du seuil électoral jusqu’à 1% à la députation nationale et 3 % à la députation provinciale, pourrait plutôt pousser les partis politiques à modifier leur comportement et à présenter des listes des candidats dans un plus grand nombre de circonscriptions, et espérer enfin rafler plus des sièges.
Beni ville est considérée comme le fief du RCD-KML et de la DCF-N, deux partis politiques chers à Mbusa Nyamwisi depuis plus d’une décennies. Mais étonnamment, la DCF-N s’en sort difficilement avec un siège tandis que le RCD-KML rate tout. Est-ce un problème de seuil électoral ?
Nombreux sont les candidats qui ont postulé sans savoir que remplir le seuil électoral était une condition légale, pour qu’une liste des candidats puisse participer à la distribution des sièges dans une circonscription.
Cette ignorance a pour conséquence, d’un côté, plusieurs candidats se sont retrouvés élus avec des milliers de voix mais ont échoué, parce que leurs partis politiques n’ont pas atteint le seuil électoral alors de l’autre côté, les candidats qui ont postulé dans les partis politiques remplissant le seuil, ont arraché les sièges même avec moins de voix.
Sur sa page « X Corp » (Twitter), l’un des candidats favoris, l’homme d’affaires et notable PDG Jonas Kasimba a écrit :
« Beni, ces résultats aux élections provinciales témoignent qu’il y a encore beaucoup à faire et à refaire pour ce pays. Nous sommes fier de faire partie de cette génération, qui doit militer pour que le changement arrive. Rien n’est perdu. Nous avons perdu les élections et non le congo », peut-on lire.
Les partis politiques, les candidats et la population devraient être bien outillés en matière de seuil électoral, pour espérer gagner les élections prochainement. Et le Législateur ne devrait-il pas revoir cette histoire de « seuil électoral » qui s’apparente à une sorte d’arnaque électorale, car les vrais élus du peuple ne sont pas toujours ceux qui vont siéger ?
Emile Udubo