Dans une démarche novatrice et symbolique, l’Église de l’Ouganda a décidé de mettre fin à la tradition de déposer des couronnes de fleurs sur les cercueils lors des funérailles. À la place, elle encourage désormais la plantation d’arbres pour rendre hommage aux défunts. Cette initiative, inscrite dans son plan stratégique 2026-2030, vise à promouvoir la conservation de l’environnement et à lutter contre les effets du changement climatique, tout en offrant une alternative durable aux pratiques funéraires conventionnelles. Les prêtres de la province anglicane ougandaise seront chargés de guider cette transition écologique, qui s’annonce autant spirituelle que pratique.
Un hommage vivant et durable : « Voir un arbre s’épanouir après le décès d’un proche constitue un souvenir bien plus marquant que des fleurs qui fanent rapidement », souligne un observateur local.
Cette idée, qui allie mémoire et respect de la nature, a déjà séduit de nombreuses communautés. À Arua, dans le nord-ouest de l’Ouganda, certaines familles ont même remplacé les pierres tombales par des arbres, chaque tronc représentant une personne disparue. Un grand monument central, orné de plaques nominatives, permet d’identifier les défunts, créant ainsi un cimetière vivant, à la fois émouvant et respectueux de l’écosystème.
Cette pratique n’est pas entièrement nouvelle. Elle a été initialement proposée par l’Église de l’Ouganda dans le royaume de Bunyoro Kitara, où elle est déjà en cours d’adoption. « Nous sommes déjà engagés dans cette voie ici », témoigne un habitant de la région, fier de voir cette idée reprise à une échelle nationale.
Une mesure écologique aux multiples enjeux
Si l’abandon des couronnes funéraires est salué comme un geste louable, certains estiment que l’impact environnemental des rites funéraires ne se limite pas aux fleurs. « Ce qui détruit vraiment l’environnement, ce sont les matériaux non biodégradables comme les cercueils en plastique, le béton ou le ciment utilisés pour les tombes », fait remarquer un commentateur. Il propose que l’Église impose des régulations strictes, interdisant par exemple l’inhumation dans des sépultures faites de matériaux nuisibles à la nature. « Les gens construisent même des bâtiments sur des tombes sans se poser de questions. Où en serions-nous si nos ancêtres avaient été enterrés ainsi ? », s’interroge-t-il, appelant à une réflexion plus large sur les pratiques funéraires modernes.
D’autres voix suggèrent une approche hybride : planter un arbre pour chaque couronne déposée, afin de préserver la symbolique des fleurs tout en renforçant l’engagement écologique. « Les couronnes ont leur importance dans ces moments de deuil », estime un fidèle, plaidant pour un équilibre entre tradition et innovation.
Si l’initiative est largement applaudie, elle soulève aussi des questions pratiques. « C’est une excellente idée, mais il faut s’assurer que les arbres plantés grandissent et atteignent leur objectif », prévient un défenseur de l’environnement. Trop souvent, des arbres sont plantés sans suivi, laissés à l’abandon, et comptabilisés comme des réussites malgré leur dépérissement. Pour que ce projet porte ses fruits, l’Église devra mettre en place des mécanismes de suivi et mobiliser les communautés locales.
Une tradition en mutation
Cette décision de l’Église de l’Ouganda marque un tournant dans la manière dont la société ougandaise envisage la mort et la mémoire. En transformant les cimetières en forêts vivantes, elle propose une vision où le deuil devient un acte de création et de soin envers la planète. Dans le royaume de Bunyoro Kitara, où l’idée a germé, certains y voient même une dimension spirituelle : « Les Baganda pourraient commencer à vénérer ces arbres, croyant que l’esprit des défunts y réside », plaisante un habitant, soulignant le potentiel culturel de cette évolution.
À l’heure où le changement climatique menace les écosystèmes du monde entier, l’Église de l’Ouganda offre ainsi un modèle inspirant, mêlant foi, tradition et responsabilité environnementale. Reste à voir si cette graine, une fois plantée, saura s’enraciner durablement dans le cœur des fidèles et dans la terre ougandaise.
Claudine N. I.