Dans un geste audacieux alliant créativité et activisme, l’artiste peintre Jonatemp Mbomba a quitté Kinshasa pour Goma, porteur d’un message de paix pour ses compatriotes déplacés par la guerre. Son concept novateur : transformer les bâches des abris de fortune des déplacés internes en véritables tableaux d’art grandeur nature.
« On dit souvent que : « Qui veut la paix, prépare la guerre », et je pense que la guerre est cuite à présent, nous voulons la paix », déclare Jonatemp, résumant ainsi l’essence de son projet artistique.
Parmi ses œuvres les plus frappantes, on trouve une représentation saisissante d’une colombe en tenue de chef cuisinier, arborant les couleurs du drapeau de la RDC. Cette « colombe-chef » prépare un plat dans une marmite posée sur un feu, alimenté par des kalachnikovs AK-47. De la marmite s’échappe une fumée portant le mot « AMANI », qui signifie « paix » en swahili. Cette métaphore puissante illustre l’aspiration du peuple congolais à transformer les instruments de guerre en outils de paix.
D’autres abris arborent les portraits de figures emblématiques telles que Patrice Lumumba et Mamadou Ndala, un officier de l’armée considéré comme un héros national. Les messages de paix, de joie et de liberté sont omniprésents, répétés en plusieurs langues sur les bâches : « Paix », « Joie », « Freedom », « Amani », « Kimia ».
« Ce concept va doublement attirer l’attention de plus d’une personne qui passera ici et le message est clair. Du désespoir peut sortir de l’espoir », explique Jonatemp, soulignant l’impact visuel et émotionnel de son travail.
L’artiste n’est pas seul dans cette entreprise. Il est soutenu par le collectif INGOMAFRIKA, basé à Goma, dont les membres participent activement au projet en réalisant des graffitis sur les bâches.
Cependant, Jonatemp reconnaît les limites de ses ressources. Ayant déjà transformé une vingtaine d’abris, il aspire à étendre son message à l’ensemble des camps de déplacés internes autour de Goma. Un défi de taille, compte tenu de l’ampleur de la crise humanitaire provoquée par la reprise des conflits depuis novembre 2022, qui a poussé près d’un millier de personnes à se réfugier aux alentours de la ville.
Cette initiative artistique unique met en lumière non seulement le pouvoir transformateur de l’art, mais aussi l’urgence de trouver des solutions durables à la crise des déplacés en RDC. En attendant, les œuvres de Jonatemp et de ses collègues continuent d’apporter couleur, espoir et dignité dans les camps, rappelant à tous que même dans les circonstances les plus sombres, l’esprit humain peut trouver des moyens de s’exprimer et d’aspirer à un avenir meilleur.
FNK